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La communauté monastique cistercienne de Preuilly, sur la commune d’Égligny, est implantée à la fin de la deuxième décennie du XIIe s. L’abbaye est installée sur un léger replat dominant de 5 m environ le fond de vallée aménagé en plusieurs viviers entre lesquels passe le ru canalisé de Preuilly ; elle se situe à 2 km au nord des premières habitations, à mi-distance entre Châtenay-sur-Seine, au sud, et Donnemarie-Dontilly, au nord. Le domaine monastique clôturé, couvre 14 ha environ. Bien que l’abbaye ne bénéficie pas des privilèges statutaires des quatre filles aînées de l’Ordre : La Ferté (fondée en 1113), Pontigny et Clairvaux (fondées en 1115), et Morimond (fondée en 1117), sa cinquième place dans l’ordre des fondations cisterciennes fait de la création de Preuilly un tournant dans le développement de la congrégation.
La première charte relate en détail la fondation de l’établissement monastique de Pruliacum, en 1118, par le comte de Blois (de Chartres et de Brie) Thibaut IV le Grand (1102-1151), devenu Thibaut II comte de Troyes et de Champagne à partir de 1125 par sa mère Adèle de Normandie (1067-1137), fille de Guillaume le Conquérant. Le site d’implantation se situe sur un territoire excentré du comté de Brie, proche du comté de Blois, possession familiale d’origine du comte.
La fondation du monastère semble procéder d’un calcul politique, le comte de Champagne marquant l’appartenance de ce territoire forestier et frontalier à la limite du domaine royal. La protection royale ne tarda d’ailleurs pas puisqu’en 1138, Louis le Jeune (1137-1180) donnait au monastère sa terre d’Aigremont. Le rayonnement des premiers abbés et l’attrait de la société laïque pour le nouvel ordre favorisèrent un recrutement conséquent qui permit au monastère, dès la première décennie de son existence, d’essaimer en fondant Vauluisant (1127), puis La Colombe (1129) et Barbeau (1147).
Des études pluridisciplinaires ont été entreprises sur l’abbaye, sous la direction de François Blary, avec un recensement, une étude des archives conservées, des prospections géophysiques et un relevé microtopographique du domaine. Une étude de bâti et des relevés d’élévation ont également été réalisés sur l’abbatiale et sur un bâtiment domestique encore bien conservé : la grange des Beauvais.
Après avoir effectué en 2016, des sondages d’évaluation du potentiel stratigraphique, d’une part, sur la salle capitulaire et, d’autre part, sur la grange des Beauvais des fouilles programmées triennales 2017-2019 ont été autorisées.
La campagne de fouilles 2018 conduite du 3 juillet au 3 août a porté principalement, pour la fouille, sur deux secteurs de la grange des Beauvais : la salle GB3 (salle voûtée au centre du corps de bâti), la salle GB5 (située au nord de la salle intermédiaire GB4) et, pour le nettoyage des pièces et le décroutage des murs, sur les salles situées aux deux extrémités du bâtiment : les salles GB1, 2, 7, 8 et 9. En outre des relevés de bâti ont été complétés dans la salle GB4. Sur l'ensemble de ces espaces les données sont particulièrement intéressantes.
Les éléments spectaculaires d’un atelier métallurgique de grande ampleur ont été mis en évidence dans la salle GB4 dès 2016. Un sondage limité, au droit de la base de la colonne centrale de cette salle montre que cette activité a été exercée du XIIe jusqu’à la fin du XIVe s.
La fouille, qui s'est poursuivie en 2017 dans cette salle livre peu à peu le schéma de l’organisation spatiale de cet espace et révèle son évolution au sein de l’espace monastique.
En 2018, la fouille s'est poursuivie dans les salles voisines qui forment avec GB4 un ensemble fonctionnel. Dans la salle GB3 nous recherchions l'origine de l'activité métallurgique et l'organisation de la pièce avant sa division en deux (GB3 et GB4). La fouille a mis en évidence les désordres de la maçonnerie, et le confortement des voûtes après un incident (ou incendie). Dans la salle GB5 L'activité métallurgique a révélé son intensité sous forme d'épais niveaux stratigraphiques de terres rubéfiées.
Les campagnes de fouilles programmées participent également à la formation des étudiants de l’ULB dans le cadre des stages organisés par le CReA-Patrimoine.